Jean-François est un jeune homme qui ferait un gendre parfait pour bien des mères en mal de compagnon pour leurs filles. Mais ce jeune homme est très perturbé. Sa mère me l’a adressé en me suppliant de le recevoir au plus vite. C’est un jeune homme de presque 30 ans que je reçois à mon cabinet de thérapie. Il est comme émotionnellement sidéré. Depuis des semaines, il n’a de cesse de penser à une éventuelle homosexualité. Il a une « petite amie« , une vie sexuelle épanouie et l’idée d’être homosexuel génère chez lui une peur terrible, des crises de panique qui le rendent dingue.
Elle est mignonne comme un cœur Marie. Très féminine au sens ou un homme tel que moi peut interprété la féminité. La grâce, la légèreté, habillée de façon sexy – au sens où elle inspire le désir -. On ne peut pas être indifférent, ou indifférente, à son charme. Marie est jeune, 24 ans, a eu quelques relations sentimentales qu’elle qualifie de normale avec des hommes. Elle répète ne pas avoir de problèmes avec sa sexualité et pourtant, elle sent bien que le charme de certaines femmes opère sur elle. Que son propre sexe ne la laisse pas indifférente. Elle n’a rien contre l’homosexualité mais sent, confusément, que quelque chose est entrain de modifier les paramètres de ses perceptions affectives voire sentimentales et sexuelles. Elle n’aime pas cette idée.
Ali est un homme qui doit pratiquer le sport d’une façon particulièrement active. Il se dégage de lui une image très douce sous ses airs bourrus. Lui, seules les femmes l’intéressent. Il est tombé amoureux d’un homme il y a quelques mois. Il n’en n’a parlé à personne et rien n’a jamais été vécu entre lui et cet homme qu’il a tant aimé. Il ne comprend pas, se protège des êtres masculins comme il peut allant jusqu’à répugner de leur serrer la main ou d’être trop à proximité physique des gens du même sexe que lui. Il est très en colère. Je le trouve même à la limite d’une violence mal contenue. L’idée d’être homosexuel lui est impossible, insupportable. Il vient me consulter pour sortir de ce qu’il qualifie lui même d’enfer !
Le point commun entre ces trois personnes? Le même. Tous les trois ont peur d’être homosexuel, voire pire, au sens de l’un d’entre eux, d’être bi sexuel.
Être homosexuel – C’est quoi le problème
Être homosexuel(le) consiste donc à avoir une relation sentimentale avec une personne de même sexe que soi. Qui dit relation sentimentale dit, à compter d’un âge que je ne saurais déterminer, éprouver de l’intérêt, du plaisir à partager des moments sociaux, culturels, intellectuels, professionnels pour une autre personne de même sexe que soi. Qui dit éprouver ce plaisir laisse entendre que – parfois – cela puisse évoluer en désir affectif puis sexuel si… affinités.
Etre homosexuel(le) induit d’accepter d’être différent au sens où l’on se sent épanoui(e) dans une relation avec une personne comme soi, et que l’on est prêt à assumer voire à revendiquer sa différence. De fait, ne pas être comme tout le monde, c’est à dire hétérosexuel. Encore faut-il pouvoir assumer quelque chose qui, dans le conscient ou l’inconscient collectif était il y a peu jugé comme une maladie mentale, une perversion, une déviance. Je vous rappelle que dans certains pays, être homosexuel(le) est un crime passible de la peine de mort et que dans notre beau pays, il y a à peine 30 ans, l’homosexualité était soignée au même titre qu’une maladie mentale.
L’homosexualité suscite des débats et des comportements passionnés depuis toujours. Chez les Grecs, l’homosexualité était normale. C’était même la vraie sexualité. Dans l’ancienne société grecque, les relations sexuelles avec les femmes ne pouvaient se concevoir que dans une optique de reproduction. La femme n’était qu’un élément porteur de l’enfant. La femme n’était pas considérée comme un élément probant de désir sexué.
Notre société a évolué au sens où elle s’est modernisée (il paraît). Cela signifie qu’elle s’est dotée de divers moyens pour être plus productive et pour se rendre le quotidien plus facile (il paraît bis). Il y par exemple l’amélioration des conditions de travail, l’ouverture sur le monde, l’informatique, la médecine. Pour autant, cette société qui se modernise et qui prétend avancer avec son temps fait preuve de comportements pour le moins rétrograde avec la différence avec tout ce qui n’est pas conforme à son histoire, à sa culture. N’est-ce pas en ces termes, sur cette question de différences culturelles et sociales, qu’il nous faut appréhender et gérer l’angoisse d’être homosexuel?
L’angoisse de l’homosexualité
Être homosexuel signifie avec des relations avec une ou des personnes de même sexe que soi, relatons que la plupart des gens ne considère pas comme naturelles.
Ainsi, point de femme enceinte de façon naturelle, ainsi force jugements sur soi de la part de gens qui ne savent pas ou n’acceptent cette différence – j’en veux pour mémoire les débats passionnés mais violents qu’a suscité le mariage pour tous -. Ainsi risques de quolibets et autres moqueries imbéciles, ainsi risque de mises à l’index et d’exclusions.
Être homosexuel(le) signifie non seulement s’accepter dans son désir de l’autre mais aussi s’assumer comme tel(le). Or, quand un homme est pris au débotté par un désir qui le fait s’interroger sur sa propre sexualité, il y a de quoi être pris d’angoisses voire de crise d’angoisse. Pour certaines personnes, cela va jusqu’à être bouleversant au sens où un tel désir remet en cause leur équilibre psychique et physique, l’image que l’on a de soi, la confiance en soi.
Quand je me réfère aux patientes et patients qui viennent me consulter à ce propos et au désarroi dans lesquels cela les plonge dans une peur particulièrement importante. Toutes les valeurs sont remises en cause. Le positionnement des intéressés dans leur propre vie comme dans leur relation aux autres, à la famille, aux amis, aux collègues de travail.
A ce propos, les personnes bouleversées par des désirs homosexuels et issus d’une culture maghrébine ou orientale sont encore plus fragilisés. Ils ressentent une honte et une culpabilité particulièrement douloureuses et repoussent l’éventualité de leur homosexualité avec force. Je me souviens d’un patient d’une beauté inouïe qui assumait très bien son homosexualité mais la cachait à ses parents. Il vivait dans la peur d’être découvert et passait son temps à mentir à tous les membres de sa famille.
En agissant de la sorte, il avait fini par être affecté de troubles anxieux qui lui rendaient ses relations avec les autres assez difficiles. Il passait son temps à jouer un rôle et ce d’autant plus qu’il se sentait femme et ne pouvait vivre sa transexualité ou le transgenre dont il se prévalait comme il en avait besoin.
Nous avons essayé de travaillé sur son positionnement mais sans jamais arriver au succès escompté. Se présenter à sa famille dans sa réalité et son identité propre lui était insupportable. Il avait le sentiment d’être un traître et était très angoissé à l’idée de faire du mal à ses parents. Seul son frère cadet était informé de cette identité sexuelle. Lequel frère était lui aussi homosexuel.
Comment dépasser la peur d’être homosexuel
Dans le parcours de vie d’un homme ou d’une femme, et à plus forte raison quand vient le moment de s’affirmer dans son identité sexuelle, il est normal de se poser des questions à propos de sa propre sexualité d’une part et d’être bouleversé voire très angoissé à l’idée de ne pas être… comme tout le monde d’autre part.
Dans le même registre, il est bien compréhensible d’être perturbé par le désir que l’on ressentir pour une personne du même sexe que soi alors que l’on a toujours vécu et éprouvé du plaisir dans une ou des relations sentimentales et, accessoirement, sexuelle,s avec une personne du sexe opposé (pourquoi – opposé? -).
Quand j’avais 20 ans, je me souviens m’être posé ce type de questions alors que, plusieurs jours durant, un ami et moi avions dormi dans le même lit. Les discussions que lui et moi avions à propos de notre sexualité comme certains de nos comportements assez troubles m’ont fait me poser question sur mes désirs homosexuels. Je me posais la question de mon éventuel désir pour cet ami et ai fini par convenir que si ma question était normale ma réponse était exclusivement hétéro. je pense qu’il en a été de même pour lui mais nous n’avons jamais évoqué cela de façon précise. Je pense que nous avions trop peur de la réaction de l’autre.
C’est en acceptant l’éventualité d’être homo ou d’éprouver un désir homosexuel et, partant, la possibilité de l’assumer, que j’ai dépassé ce que je ne vivais pas nécessairement comme un problème. Bien sur, si cette homosexualité s’était affirmée, j’aurais pu être perturbé mais je ne me suis pas posé la question de savoir si c’était bien ou mal.
Je n’ai pas eu peur de perdre l’amour des miens ou d’être exclu. Je pense que j’aurais simplement compris que mon orientation sexuelle était celle là et je l’aurais sans doute accepté par… amour pour moi ce qui m’aura évité la peur d’être jugé pour ce que je suis et non pour l’image que je me devais de donner de moi aux autres !
Car, à bien y réfléchir, n’est-ce pas là que se situe le problème? Dans l’amour inconditionnel?. En effet, n’être pas comme tout le monde fonde la peur d’être mis à l’écart, d’être jugé. De se sentir anormal voire malade. A preuve, le nombre de patients qui me consultent et qui consomment force médicaments car ils sontt dépressifs à l’idée d’être homosexuel(le). C’est en travaillant sur la confiance en eux, l’image qu’ils ont d’eux mêmes puis sur l’acceptation de soi qu’ils peuvent parfois dépassé le problème de l’angoisse de l’homosexualité.
Celles et ceux qui ont refusé, parfois violemment, cette éventualité, en ont été quitte pour une dépression importante dans la mesure où ils ont été confrontés à des conflits intra psychiques (phobie). Ils ne se positionnaient que dans la peur du jugement des autres à leur endroit. Plus difficilement par rapport à eux mêmes. C’est en refusant catégoriquement une éventualité qu’ils se sont retrouvés face à des gros problèmes émotionnels. Un peu comme quand un homme ou une femme refuse l’idée que sa compagne ou son compagnon puisse ne plus l’aimer un jour ou le quitte un jour.
Pour en finir, provisoirement, ce n’est pas parce que vous êtes bouleversé(e) par une émotion de désir que vous ressentez à propos du personne de même sexe que vous que vous êtes dégénéré, pervers, homo, anormal ou encore malade. Personnellement, je suis parfois bouleversé devant les images de Johnny Depp que je trouve d’une beauté époustouflante. Cette beauté ne me laisse pas indifférent et puis voilà…
Dernière chose, au delà de l’homosexualité dont vous ne ferez un problème que si vous le voulez bien (je sais que lorsque j’écris cela certains d’entre vous me déteste !). En toute homme, il y a une part de féminité. En toute femme une part de masculinité. Le plus simple ne serait-il pas de l’accepter? Pourquoi être refuser l’idée de votre sensibilité?
C’est comme si, homme, genre mâle dominant, vous étiez en colère de pleurer devant une scène de film. Pourquoi refuser la preuve que vous êtes sensible au monde qui vous entoure? Je comprends que cela puisse générer chez vous angoisses, crises d’angoisses voire crise de panique… tant que vous refusez votre réalité. Cette réalité peut être ponctuelle ou permanente. un peu comme avec un(e) employeur. On peut éprouver le désir de suivre un employeur, une directrice de département au bout du monde, avoir le même sexe que l’intéressé(e), ne jurer que par cette personne et se sentir ému(e) de sa présence. Cela fait-il de vous un(e) homosexuel(le)? Le problème ne réside t’il pas plus dans les limites que vous saurez ou non mettre dans vos relations à l’autre pour, éventuellement, vous protéger de l’éventualité qu’il ou elle profite de son charme à votre détriment. La peur de ne pas y arriver peut vous angoisser. C’est normal. Alors, parlez en autour de vous ou consultez un thérapeute si vous en éprouvez le besoin.