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La douleur – Comment devenir fou

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La douleur – Comment devenir fou

Il y a peu, j’ai reçu le message d’un patient dont la douleur indicible et terrible semble le ronger un peu plus chaque jour. J’avais essayé d’accompagner cet homme il y’a quelques années puis nous nous étions perdus de vue. Aujourd’hui, avec son accord, j’ai souhaité publier son témoignage et, partant, lui répondre.

Bonjour Frédéric,

E… de… Enfermé dans sa prison mentale.

Je vous écris des mails depuis quelques jours que je n’ose pas vous envoyer car c’est tout en vrac…et peur de paraître fou même si je sais que vous en avez entendu de toutes les couleurs… J’aimerais bien vous les envoyer, et peut être les transmettre à un collègue psy… Je paierai pour ça.

Je voulais vous remercier depuis un moment alors je vais faire simple.
MERCI MERCI MERCI !!! Vous avez besoin d’encouragements.

C’est pas gagné, je rame, galère mais j’ai compris certaines choses en vous lisant, pas tout encore mais j’avance…
Il y a quelque temps je comprenais rien quand on me parlait, je n’arrivais pas à réfléchir même si j’ai du mal encore, le stress, l’anxiété, la rumination…bouffent mon intelligence (hasch, jeu, isolement, maladie et mort de mon père il y aura un an le 25 avril avec accompagnement à domicile)… stress intense, anxiété, dépression… relation avec une femme qui a beaucoup de problèmes…au RSA je vis avec ma mère etc.

Entourage qui pleurait le jour « J » puis plus personne… Un frère fuyant qui m’a confié quelque chose de grave récemment…. Des mots comme « bouge toi » ou « mon petit! ». On a pas arrêté de me le dire après la mort de mon père alors que je l’ai accompagné jusqu’au bout!… Ca m’a détruit déjà que je vivotais, galèrais… alors j’y vais pianissimo.

J’ai une situation désastreuse. Comme vous l’a dit un internaute, tenez le cap.

Pour celui qui veut changer… Evoluer, comprendre, travailler sur lui… Votre blog est une mine d’or.

Prenez soin de vous. Vous avez des âmes à sauver encore! Mais vous ne pouvez pas aider, sauver tout le monde…
J’ai douté de vous. Désolé. Je pense que vous êtes intègre, sincère, dévoué à faire que les êtres humains se sentent mieux pour un monde meilleur, pour celui qui veut travailler sur lui… Cause perdue, ça vaut la peine d’essayer….

Je réfléchis (trop) pour un rendez vous. Je ne sais pas trop sur quoi travailler en fait de façon pragmatique
Rumination? Perfectionnisme? Stressé, je le suis beaucoup beaucoup à cause de ces ruminations… Pas mal de paranoïa aussi, je pense que ça va de paire avec la rumination… Pas confiance en moi…

Sur quoi avait on travailler pendant les 3 séances?… La procastination il me semble non?… Suis pas sûr que c’était ça le problème…

Je viens de lire votre article sur les TOCS. Je sais bien que l’absence d’encouragement de mes parents, surtout de mon père (le bac on s’en fout par exemple… Il s’est jamais excusé en passant…) est une des causes parmi d’autres de mon mal être. J’ai jamais su passer au dessus de ça, gardant une rancune énorme contre lui.

Je m’épuise chaque jour à chercher, chercher, stressé, angoissé, déprimé… Alternant les phases de rumination, de colère, un regain d’optimisme et « boom » retour dans la rumination… Je m’imagine des situations, scenarii avec toute sorte de personnes… Je me projette dans des situations imaginaires conflictuelles… Et je peste, rage, c’est fou…

Suis pas psy, j’aimerais bien qu’on me dise ce qu’il se passe, quel est le problème à traiter en priorité… (je vous avais dit que j’avais été très déçu par les psys… et à force on laisse tomber).

Cordialement

Je voulais pas m’étaler et du coup je l’ai fait!!! J’arrête.

Chère Madame La douleur,

Chaque personne, chaque cas clinique – psychique – est un cas particulier, unique. En ce qui concerne E., nous avons déjà eu l’occasion d’essayer de travailler ensemble à la résolution de son problème.

C’est un homme attachant, sensible et… en colère. Du moins, c’est ce que crois comprendre. Il semble être pris dans un étau émotionnel. Un peu comme s’il essayait d’écarter les barreaux de sa prison mentale – la douleur – et, réussissant à peine, prêt à vivre, les barreaux reprenaient leur place initiale, voire se resserraient plus encore que la fois précédente.

Il me semble évident que E. est pris dans un piège qui consiste à essayer de comprendre d’une part et à tenter de s’en sortir par lui même d’autre part. Cet homme, involontairement, alimente ses tentatives de solutions qui ont pour effet d’enrichir ses ruminations mentales, ses pensées obsessionnelles.

De fait, je m’apprête à écrire quelque chose qu’il va détester. En agissant de la sorte, ce comportement relève du « Moi Je qui parle à moi Je ». Il tourne en rond et s’enivre de ses propres circonvolutions mentales. Cela me fait penser à moi…

Comment devenir fou

J’ai coutume de penser et dire que: « La folie, c’est de recommencer les mêmes erreurs en attendant des résultats différents ». Cela vaut pour tout le monde, moi compris.

Je me souviens, des années durant, douloureusement confronté à mes problèmes personnels, avoir vainement tenté de comprendre le pourquoi du comment. La douleur était telle que j’étais convaincu que c’était dans ma propre histoire que la solution se trouvait. Ce qui n’était pas faux n’était pas vrai pour autant. Pendants des périodes plus ou moins longues, j’ai ré investi ma propre histoire pour essayer d’apaiser la douleur indescriptible que je subissais.

C’est ainsi que j’ai parcouru tous les lieux dont j’avais le souvenir, rencontré tous les gens avec lesquels j’avais vécu bien des expériences diverses. J’ai cherché et, plus je réagissais de la sorte, moins je trouvais, plus, bien évidemment, la douleur croissait.

Régulièrement, parfois plusieurs fois par semaine, je consultais des psychologues, des psychiatres, des psychanalystes. J’ai consulté pendant des années. Cela m’a coûté des fortunes. Et je cherchais. Et j’exprimais la douleur. Et je tentais de comprendre encore et toujours, d’identifier la source de la douleur qui me consumait. Des années durant, j’ai erré à en devenir fou. Je ne trouvais rien, ou si peu. Je revenais toujours à des questionnements qui ne m’apportaient rien.

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La douleur - RuminationEn fait, je cherchais aux mauvais endroits. J’étais comme égaré par la douleur. Je cherchais ailleurs ce que j’avais en moi. La douleur me rongeait et je voulais l’ignorer. La plupart du temps, je pestais contre l’incurie des psy que je consultais. Remettant en cause leurs compétences, leur bienveillance face à la douleur. Il m’était plus facile de me prendre à d’autres qu’à moi même.

J’ai mis des années à comprendre, et d’autres années encore, à accepter que le changement reposait sur ma seule responsabilité. Oui, je souffrais. Oui, la douleur était insupportable. Oui, j’étais seul face à la douleur. Mais, je ne pouvais continuer de prétendre que c’était de la faute des autres.

Je souffrais tellement de les voir me regarder comme une bête curieuse. Je ressentais tellement la douleur à ne pas être « normal ». La douleur était si vive d’avoir le sentiment de ne pas être comme tout le monde. Je me sentais si différent que je brandissais ma différence comme un soldat, blessé à mort, juste avant qu’il ne rendre son dernier souffle en brandissant l’étendard de « la » nation. A la différence près que je ne rendis pas mon dernier souffle. Je voulais vivre. Vivre d’une façon acharnée, obstinée. Mais, je refusais de lâcher la douleur comme si le disait Baudelaire, elle était, je cite: « … Ma douce compagne… ».

Tous mes comportements qui se justifiaient du fait de la douleur, de mon humanité douloureuse, étaient en fait ce dont je me revêtissais. Un oripeau, telle une manipulation affective imbécile, pour ne pas changer. J’allais, revêtu des haillons de la douleur. J’avais si peur d’être le moteur et l’acteur de mon propre changement, si peur de me tromper, si peur d’échouer – même de façon provisoire – que je ne faisais rien et revendiquais la douleur comme un mode de vie. Et j’en rendais les autres responsables. Je n’assumais pas mes comportements.

Il y a plus de 20 ans, un mois de novembre, j’ai compris que, cette fois, cette fois là précisément, j’allais tout perdre. Vraiment. Définitivement. Irrévocablement. J’allais vivre, mais j’allais vivre seul. Pire qu’abandonné. Pire que plus aimé. L’idée d’une solitude profonde dont je serais le seul responsable. Là se trouvait la vraie douleur! La douleur à côté de cette perte n’était plus rien. Ma peur de perdre ceux que j’aimais, ma peur de définitivement me perdre, et perdre les « objets » de mon amour, avait pris le pas sur la douleur.

J’avais touché le fond de la douleur. Pour la première fois de ma vie, je comprenais et prenais acte que j’étais le seul responsable d’avoir le sentiment d’être fou. J’avais tout pour moi. Pas plus bête que la moyenne internationale, j’avais séduit de jolies personnes, j’avais exercé des fonctions professionnelles que d’aucuns auraient pu m’envier, j’avais une compagne que d’autres m’auraient envié, et envient peut-être encore aujourd’hui et, pourtant, j’abîmais tout, tout le monde et moi même.

J’ai connu bien des hommes et des femmes qui, au contraire de moi, n’avaient pas tout cela tout en subissant une douleur identique à la mienne en bien des points. Notre point commun est que, un jour, nous avons décidé de cesser d’essayer de répondre à des questions qui n’avaient aucun sens et de faire preuve d’un orgueil démesuré en essayant de nous en sortir seul, sans demander d’aide. Nous avons donc choisi.

Faire acte d’humilité

Eux comme moi, avons compris que notre orgueil, nos émotions donc, étaient nos pires ennemis. Que nous étions, et serons toujours nos pires ennemis.

Je me suis rendu compte que, des années durant, j’avais tout fait pour mettre en échec tous les psy que j’avais consulté. « Des mauvais ». C’est ce que je n’avais de cesse de répéter à leur propos. J’avais si peur du changement que je préférais m’entretenir dans la douleur.

Il aura donc fallu que j’atteigne non pas un paroxysme dans la douleur, mais que je sois confronté à la réalité de ma propre solitude et, partant, de ma mauvaise foi. Je n’étais pas un mauvais bougre mais je me manipulais et manipulais les autres pour sauvegarder la douleur comme le « précieux » dans le film Hobbit (ceux qui ont vu ce film comprendront). Comportement mortifère et morbide!

La douleur - HumilitéDans un dernier sursaut, c’est contrit, en colère et sur la défensive, que j’ai demandé de l’aide. J’ai appris à faire confiance à des gens qui m’insupportaient. Venant du même environnement émotionnel que moi, ils ont pris le temps de m’apprivoiser.

Cela fait plus de 20 ans que je vais aussi bien que possible. J’ai appris, avec leur aide et l’amour qu’ils m’ont offert – parce qu’à mon tour je leur ai offert le mien – à avoir des comportements les plus adultes et les plus responsables possibles.

Même si, parfois, ma vie est difficile, compliquée. Même si ma vie, ou les éléments qui la composent de façon provisoire sont – occasionnellement – d’une violence inouïe, d’une violence sociale effarante. Je suis toujours là -vivant – et n’ai toujours pas repris mes anciens comportements.

Chaque jour, je suis impacté par la violence du système dans lequel cette humanité dit évoluer. Je suis parfois sidéré par la douleur face à ce monde que je ne comprends pas. Je suis sidéré par la malhonnêteté de ce monde dont les éléments humains n’ont de cesse de justifier la violence qu’ils infligent aux autres par la violence qu’ils disent recevoir. Cela s’appelle de la violence sociale. La violence légitime du système. Je suis sidéré par la malhonnêteté des femmes et des hommes qui nous gouvernent. Je considère qu’ils n’ont plus rien d’humain dans la mesure où seuls l’argent, des comptes équilibrés et leur soif de pouvoir les intéressent. Pourquoi veulent-ils tant laisser une trace notoire de leur passage?

Je suis triste que l’humanité me donne le sentiment de s’être reniée. Aujourd’hui, c’est impuissant que j’assiste à des comportements robespierristes. Hier, c’était bling bling à tous les étages. Une vulgarité et une arrogance époustouflante.

Cependant, entre hier et aujourd’hui, je suis toujours vivant. Debout. Contre vents et marées. Même si je doute. Et je doute beaucoup… Aujourd’hui, j’essaie de construire demain. Très récemment, mon superviseur m’a dit qu’en psychanalyse « on » appelait les gens comme moi des « non dupes ».

Puis-je changer le monde à moi tout seul? Que nenni! Dans ce monde de brutes, depuis des années, j’ai décidé de vivre tout en tenant la douleur à distance, tout en rêvant d’une humanité emplie d’amour et de respect. J’ai décidé de vivre tout en cultivant, en secret, mes utopies et mes idéaux. Je n’en fais plus des ennemis inconscients. J’en ai fait mes amis, mon intimité. J’ai cessé de jouer un rôle. Je joue, autant que faire se peut, le rôle de ma vie.

Je ne suis plus seul. J’ai compris que j’avais mon passé dans le dos et que rien ne pourrait le modifier. Il était et sera toujours là comme une plaie. J’ai cependant appris à cicatriser la douleur pour qu’elle se taise à jamais.

J’ai lâché prise à propos de mes parents et de bien d’autres gens encore. Aujourd’hui, je bénéficie d’amour. De l’amour des « miens ». De ceux qui composent ma vraie famille aujourd’hui. Je bénéficie – aussi – de l’amour de moi même.

D’aucuns m’ont enseigné l’amour – au sens spirituel du terme, hors toute dimension religieuse -. Je le tiens de ceux là même qui m’ont appris que, plutôt que d’attendre l’amour des autres qui puisse justifier mon lien à l’existence, à la vie même, je me devais de m’aimer moi même. Chaque jour, j’essaie. Chaque nouveau matin, ensoleillé ou non, est empreint de simplicité, de joies et, parfois, aussi, d’angoisses ou de peurs diverses. Avant, j’étais mort à moi même tout en pensant exister dans la douleur. Aujourd’hui, je suis vivant.

Chaque jour, je conserve à l’esprit, comme un don d’une inestimable valeur, que des hommes et des femmes m’ont appris et transmis que si je n’étais pas responsable de la douleur initiale. J’étais – je suis – responsable de la solution. Chaque jour, j’exprime ma reconnaissance à Madame la Douleur de m’avoir offert la possibilité de…changer! Merci Madame de m’avoir offert la possibilité de faire un choix. J’ai choisi, j’ai renoncé…

Plus tard, j’ai éprouvé, à mon tour, le besoin d’être ce même professionnel mauvais et incompétent en lequel on ne peut avoir confiance. Le même que tous ceux que j’avais moi même admonesté des années durant pour leurs incompétences.

J’ai donc éprouvé l’irrésistible désir de partager ce qui m’avait été offert. Ce qui, pour la petite histoire, m’a un jour valu de me faire traiter d’en… par un patient parce que je gagnais ma vie avec la maladie des autres. J’ai donc demandé à ce monsieur en quoi la sodomie était un problème pour lui… J’aurais pas du… Il est parti, fou furieux, sans honorer le règlement de sa consultation. On ne peut décidément pas avoir en confiance en ces professionnels, n’est-ce pas E.?

E… Vous êtes un homme de valeur. Qu’attendez-vous pour vous bouger le c..? Qu’attendez-vous pour demander de l’aide?

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Cabinet de thérapie comportementale – TCC


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